Je parle ici souvent de l’inertie, pas seulement histoire de râler contre ce qui ne bouge pas ou plus.
Mais qu’est-ce que l’inertie ?
En physique classique, dans un espace donné, le principe d’inertie exprime le fait que si la vitesse de tout corps ponctuel de masse m est constante, la somme des forces qui s’exercent sur lui est nulle.
Dit autrement, si vous voulez, dans le même espace, ralentir ou arrêter ce corps, il faudra exercer sur lui une force dépendant de sa masse et du temps que vous pouvez consacrer à modifier sa vitesse.
Ceci posé, revenons à nos moutons, ceux que je ciblais dernièrement comme objets de mes prochaines préoccupations : le déni de réalité chronique dont le sort de notre milieu de vie est victime.
Il me semble qu’un nombre croissant de terriens prenne conscience de l’aberration de notre mode de vie, du désastre où notre formatage à la consommation effrénée nous mène tout droit si nous ne freinons pas immédiatement des quatre fers. Le mot clé, freiner ! Revoici l’inertie !
Cette conscientisation n’est hélas pas suivie de la prise en compte du danger que nous courront et contre lequel nous devons nous engager pleinement, contents ou pas. Nos consciences empoissées par des habitudes rancies, vieilles de décennies de frivolité consumériste, ne nous poussent en rien à être concernés par le sort du monde qui, en dépit du mythe du pot de terre contre le pot de fer ancré dans nos consciences, est bel et bien entre nos mains.
De quoi peut bien naitre cette inertie qui nous paralyse, cette incapacité à changer de trajectoire, de quitter les rails tracés par nos habitudes ?
De notre répugnance à dépenser l’énorme énergie nécessaire, cf. les lois de la physique ? Ici, une énergie multiforme, d’abord individuelle mais aussi sociale, tout notre système étant structuré pour qu’elle se perde dans des méandres pervers ramenant sans cesse au point de départ de la réflexion.
De l’impossible résolution du conflit entre liberté et sécurité que notre propre inertie personnelle fait toujours pencher vers le risque minimum, juste pour sauvegarder ce qu’on a et ce qu’on est ?
Des multiples prétextes à ne rien faire parce que cela serait impossible, insidieusement implantés dans nos cervelles à coups de propagandes, de publicités et aujourd’hui plus que jamais de mensonges aussi énormes que crétins dispensés à qui mieux mieux par des réseaux imaginés au départ, sociaux, puis dévoyés en machines à décérébrer ?
De l’oubli de l’action collective, soigneusement orchestré par l’idéologie dominante, qui, dans son intérêt fondamental, pousse en avant un individualisme généralisé seul garantie de l’élimination de toute opposition à ses desseins de domination sans partage du minerai humain, unique gisement connu de temps et donc d’argent ?
Le plus étonnant dans cette triste histoire, est que la puissance de notre formatage politique, social et économique, va à l’encontre de notre instinct de conservation ! En ce sens, nous avons déjà quitté le monde des vivants pour nous vautrer dans celui des robots sans conscience du monde. Constat énervant quand on se préoccupe du débat faussé de bourrage de crâne autour de la promotion universelle et à marche forcée de ce qu’on nomme à tort intelligence artificielle.
Ce machin est en train de tout envahir dans le but proclamé de nous faciliter la vie et plus inavoué, de faire disparaitre l’humain et ses incertitudes de l’équation. De faire de nous des robots inutiles, tout ce que nous savions faire avec notre temps étant repris bien mieux par des machines qui bientôt, sauront s’auto-fabriquer si les génies de l’informatique ne sont pas frappés avant par une prise de conscience tardive.
Va-t-on se laisser évacuer dans les poubelles de l’histoire du monde sans combattre ? Cette triste perspective nous amènera-t-elle à trouver l’énergie nécessaire pour quitter la trajectoire funeste en ce moment toujours incontestée et qui nous mène à l’évaporation de ce que nous sommes ?
Devant le miroir de la salle de bain, posons-nous la question les yeux dans les yeux : on bouge ?