Il y a quelques années, j’avais réagi à un épisode malheureux du combat contre les djihadistes au Mali (cf. « Engagement » du 17/12/2019) en rappelant grandeur et servitude militaire.
Il me parait plus qu’opportun de revenir aujourd’hui sur la notion d’engagement, l’évolution du monde et de nos préoccupations permettant d’orienter la réflexion sur d’autres terrains.
En effet, nous avons refait connaissance avec une menace directe pour notre sphère avec la guerre en Ukraine et en même temps, acceptons de plus en plus unanimement une autre forme de menace plus informelle mais tout aussi urgente qui touche le climat et les ressources naturelles.
Nous comprenons au forceps que notre rêve de finitude historique et de bonheur éternel dans les bras de multinationales providentielles n’était qu’un fantasme de nantis et que nos certitudes n’étaient que maigres barricades dissimulant nos lâchetés et renoncements.
Face à ces menaces, que sommes-nous prêts à sacrifier ?
Si soudain, un de nos voisins, ou plus sûrement, un de nos compétiteurs plus lointain, pris d’une soudaine lubie impérialiste, nous rentrait dedans comme Vlad 1^er dans l’Ukraine, nous précipiterions-nous vers les bureaux de recrutement pour prendre les armes et ramener l’impudent à la raison ? Serions-nous capables comme les Ukrainiens, de tout quitter en un instant après avoir envoyé femmes et enfants au plus loin, pour sauter dans une tranchée et en découdre à coups de lance-roquettes avec le premier blindé malvenu ? Au risque d’être transformé en hamburger.
Posez-vous la question, sans vous planquer derrière des arguments du genre : mais ça n’arrivera jamais, on a la bombe ! Ou bien : on n’a pas d’ennemis autour de nous !
Vue de dehors, la France est si belle, il n’y a bien que les français pour s’y trouver si mal. Un de nos ennemis traditionnels des siècles précédents avait repris l’expression yiddish en forme de « glücklich wie Gott in Frankreich », « heureux comme Dieu en France » : quand on entend ça, il faut s’attendre à être visité, à vélo ou à chenilles, c’est selon le caractère du patron d’en face !
Plus sournois, mais aussi plus urgent, à force de se faire matraquer à juste titre par le GIEC et malgré les dénis des puissants qui ménagent leur prospérité, nous commençons à comprendre que la foire au gaspillage et à la lumière allumée toute la nuit ne pourra pas durer et qu’il est déjà bien tard pour se réveiller avant de se retrouver plus vite que ça dans un âge sombre inédit où chacun devra sortir son couteau pour s’emparer du peu qu’il restera à se partager.
Je n’exagère pas une seconde et suis de plus en plus inquiet de ne pas voir le début du commencement d’une forte réaction politique globalisée seule à même de réorienter nos sociétés vers plus de frugalité et de bon sens dans l’usage de l’énergie et des ressources naturelles. Ce n’est cependant pas parce que nos dirigeants totalement inféodés aux accapareurs qui feront tout pour garantir leurs moissons de nos richesses, ne font rien que nous devons les imiter !
La crise des retraites est d’ailleurs emblématique de notre propre vision à court-terme, cette mobilisation justifiée contre une nouvelle atteinte à nos acquis ne faisant pas le moindre cas de l’état du monde au moment où, les plus jeunes qui remuent beaucoup aujourd’hui, atteindront enfin ce moment fatidique, rompus de chaleur, les pieds dans l’eau ou la poussière, manquant de tout au point de devoir se battre pour subsister. Notre sens des priorités est vraiment bizarre… Je sais, je lutte pour le renverser en moi, l’effort est considérable et le naturel indocile.
Alors donc, commençons nous-même aujourd’hui en boycottant tout ce qui n’a pas d’autre intérêt que de nous pousser à consommer, en cessant de nous déplacer frénétiquement juste pour se vanter d’être allé passer un jour au bout du monde, en cessant de voter pour des menteurs compulsifs ou des partis aux vitrines alléchantes mais perdus dans des querelles d’égos byzantines. Rien ne nous en empêche sauf notre conformisme et notre immobilisme même si je conçois qu’il est bien difficile de renoncer au rêve de prospérité éternelle que vend depuis des décennies l’idéologie néolibérale.
Une fois conscience prise, il reste à s’engager dans l’action. Cette seconde étape est effrayante en ce qu’elle implique de sacrifices, de risques pris, de renoncements à la facilité et au confort. S’engager, c’est être fidèle à ses convictions et les défendre sans esprit de recul. L’espoir renait lorsqu’une grande convergence de compréhension du monde se fait jour, donnant naissance à un engagement sociétal massif assez puissant pour faire reculer nos égoïsmes, les chars ou les dollars !

Ton combat pour la planère est juste. A mon niveau, je trie, je ne suis pas (trop) addict à la mode, je réduis mon chauffage, etc...Mais, à bien y réfléchir, à quoi cela sert-il quand les plus gros pollueurs (USA, Chine...) continuent à faire comme avant ? Quand notre concubine européenne (il parait que nous formons un couple) arrête ses dernières centrales nucléaires pour produire de l'électricité avec ses vieilles centrales à charbon ? Quand Thomas Pesquet prêche pour la sauvegarde de notre terre tout en n'hésitant pas à grimper dans une fusée pour aller faire quelques tours de la lune ? Face à cela, tous nos efforts sont malheureusement inutiles.