Que penser des manifestations de révolte et plus largement de l’extension d’une contestation des mesures imposées aux populations pour se protéger du Covid19 ?
Elles sont clairement issues d’un courant de scepticisme de plus en plus vivace aux racines très diverses qu’il devient urgent d’examiner de près et de combattre en revenant à la raison tant soit qu’elle n’ait pas quitté nos latitudes.
La cause première est la valse-hésitation des dirigeants politiques et de l’administration impréparés à ce genre de crise et surtout au degré d’incertitude qu’elle génère, qui se pose en contradiction totale des habitudes dogmatiques prises de longue date en matière de gouvernement. En effet, déjà réfractaires aux notions de planification, ils se révèlent incapables de mener une guerre de conduite, c’est-à-dire de réagir efficacement à des événements imprévus
Ensuite vient celle, bien involontaire, des scientifiques pris en otage des médias qui ne connaissent qu’un mode binaire de pensée (cf. « Binaire » du 29 mars 2020) et appliquent cette règle à un domaine où la troisième voie, celle du doute, devrait être la seule qui vaille, surtout au début d’une pandémie qui distille petit à petit ses caractéristiques au gré des observations de terrain. Ainsi, la convocation des experts en tous genres sur les chaines d’information en continue où ils sont priés d’adopter une position du type «0 ou 1, droit dans ses bottes », engendre une cacophonie préjudiciable à leur sérieux alimentant le doute général sur leurs compétences.
Ajoutez à cela la pression exercée sur les gens par les mesures de confinement aux conséquences terribles sur les vies de famille, les emplois, les habitudes de vie, une pincée de hâte effrénée d’en sortir, secouez bien et vous obtenez un cocktail détonnant menant à ces premières manifestations.
A ces causes directes il est nécessaire d’ajouter deux éléments de contexte particulièrement aggravants : l’incertitude et l’individualisme.
L’incertitude : personne n’accepte que les scientifiques puissent dire qu’ils ne savent pas encore comment la chose va évoluer, comment elle sera combattue à l’avenir et par quoi ! La pression exercée sur ces chercheurs les force à s’engager dans des certitudes contraires au doute et à l’esprit critique, à brûler les étapes habituelles à la compréhension du mal permettant la création prudente et sécurisée de médicaments ou de vaccins, à se discréditer en débattant ouvertement de leurs hypothèses au risque de faire paraitre ces salutaires querelles pour des combats de coq qu’elles ne sont pas ! Personne n’accepte non plus les perspectives économiques naturellement sombres mais aux détails encore plus obscurs, nul ne sachant qui sera frappé ni quand !
L’individualisme : j’en parle très souvent ici comme conséquence de l’idéologie économique dominant tout et chacun. Elle impose une croyance aveugle dans l’initiative individuelle contre les services publics, la réfutation de toute autorité hors celle des marchés. D’où le mépris des politiques –tous des menteurs- des scientifiques –tous vendus aux multinationales- et surtout l’attrait pour les fake news qui amènent une quantité croissante de gens à ne plus croire en rien, pas même aux vaccins qui ont sauvés leurs ancêtres, leur permettant ainsi d’être là à contester tout et n’importe quoi ! L’esprit critique ayant été éradiqué de cette forme pathologique de non-pensée, on n’est plus à une contradiction près !
Aussi ne faut-il pas attendre un comportement responsable de tous ceux qui ne supportent plus la moindre contrainte venant des autorités tout en se livrant pieds et poings liés aux pires bonimenteurs vantant les pires dérives idéologiques. Ce ne serait qu’attristant si les égos nombriliste et aveugles de ces immortels autoproclamés ne laissait pas sans défense tous ceux que la maladie touche en priorité : leurs parents, leurs grands-parents, ceux qui ne sont pas mainstream, les gros, les essoufflés, en un mot les losers composant le pan négatif de leur univers libéral qui lui, avance sans masque vers le gouffre qu’il nous creuse inlassablement.