Comme beaucoup, j’observe depuis longtemps avec attention l’évolution des offres de nature culturelles, dans tous les domaines de la chose, portée par toutes sortes d’acteurs qu’ils soient publics, associatifs ou privé.
Cette offre a crû considérablement, essentiellement en direction des spectacles vivants qui se multiplient, surtout en période estivale de plus en plus encombrée de festivals en tous genres au point qu’on ne sait plus où donner de la tête tout en remarquant la présence des mêmes têtes d’affiche un peu partout.
Comment en est-on arrivé là ? Qu’est-ce qui anime ce mouvement ?
Je crois qu’il s’agit d’une conjonction entre les évolutions des supports et des publics.
Côté matériel, le surgissement d’internet a ruiné l’industrie musicale et menacé tout ce qui est proche du cinéma, a déconsidéré les livres au profit du butinage, enfermé les beaux-arts dans des ghettos de classe et condamné l’architecture au spectaculaire !
Côté artistes, il s’agit maintenant d’aller au contact permanent de publics fugaces et volatils faute de ne plus tirer de revenus des sources traditionnelles au risque de se carboniser en actions incessantes.
Côté public, individualisme aidant, le goût dominant vibrant au rythme de modes virevoltantes condamne l’approche artistique au superficiel et à la frénésie.
Mais ce n’est pas le plus grave à mes yeux.
Dans ce domaine aussi, au-delà d’une ségrégation financière bien réelle, l’origine sociale devient plus que prégnante, générant une forme sournoise de communautarisme élevant des barrières culturelles infranchissables, la faute aux codes propres à toutes les chapelles ainsi édifiées avec jalousie dans une société en cours de fragmentation accélérée.
L’art, dans ses nombreuses manifestations, n’est pas toujours abordable instinctivement au premier degré et même si c’est le cas, disposer d’une caisse à outils d’interprétation bien garnie ouvre des perspectives vertigineuses et passionnantes de compréhension, transcendant les questions d’origine ou de classe.
La faillite totale de l’enseignement artistique à l’école et dans la plupart des familles accablées de charges et de diversions faciles, nourrit un peu plus chaque jour la désintégration de notre société et la mène à un nivellement culturel tendant vers une soupe informe et nauséabonde.
Pourtant, essayez de quitter le confort des conversations de pluie et de beau temps pour vous aventurer dans le champ des arts et vous serez étonnés de l’éveil aussi soudain qu’inattendu d’interlocuteurs vus comme habituellement apathiques, Vous les verrez ouvrir soudain leurs jardins secrets dans un enthousiasme communicatif nourrissant votre curiosité, bousculant vos idées préconçues de classe ou autres pour atteindre le plaisir de jouir de ce qui nous rapproche et oublier la religion de la différence.
L’art touche à l’intime de chacun d’entre nous, là où se trouve le secret de notre vision du monde mais aussi la précieuse clé qui nous ouvre aux autres pour apprendre d’eux.et ne plus les reconnaitre uniquement comme des ennemis potentiels. Cette approche individuelle au départ car dépendantes de nos goûts et couleurs, n’est qu’une première étape vers un large partage qui ne doit être entravé ni par une question de finance et encore moins par une question de codes ou de clés.
Une fois encore, une fois de plus et comme toujours, l’éducation revêt une importance capitale.