Le programme de Syriza pour les élections de janvier 2015 comportait 600 pages.
Podemos rivalise, avec 332 pages déclinées en 394 propositions. Vous y trouverez forcément ce qui vous plait, c’est la compilation des désidératas des différents groupes que l’on retrouve chez nous dans les forums sociaux ou sur les places de La Nuit Debout. C’est le genre de propositions dont il est très difficile de se prononcer contre tant elles sont dégoulinantes de bienveillance et d’amour du prochain.
Il faut donc chercher ce qui manque. Ce qui fera que tout ce fatras n’est que paroles en l’air pour les crédules, afin qu’un nouveau calife soit calife à la place du calife, un Hollande à la place d’un Sarkozy, un Mélenchon guignant le poste. Ceux qui n’ont pas compris le Tsipras ont droit à un remake.
Alors, qu’est-ce qui manque ?
Il manque d’abord le refus de la soumission aux institutions européennes. Sur les 394 propositions, 7 seulement concernent l’Europe.
Proposition n°12 : « Conception d’une proposition alternative à la stratégie énergétique de la Commission européenne ». Si Podemos remportait les élections, il s’engage à concevoir une alternative ! Alternative dont la Commission se ficherait éperdument si jamais elle voyait le jour.
Proposition n°57 : « Création d’une agence de notation européenne publique ». Les agences de notation déterminent le risque des emprunts. Rien que l’idée de concevoir une telle agence montre que Podemos a l’intention que l’État espagnol continue à se financer auprès des banques privées au lieu de recouvrer sa souveraineté financière.
Proposition n°84 : « Promouvoir une réforme des statuts de la Banque Centrale Européenne ». Voilà des paroles aussi creuses que celles de la proposition n°12 mais qui ont l’avantage de donner une coloration positive au sens concret du programme : continuer à se soumettre aux dictats de la banque de Francfort !
Proposition n°85 : « Nous impulserons une réforme des institutions européennes pour démocratiser les décisions politiques et économiques dans la zone euro ». Ça tombe bien, après le Brexit, tous les libéraux couinent que l’Europe ne peut plus se faire sans les peuples. Ils vont tous pouvoir se concerter pour un nouvel enfumage.
Proposition n°86 : « Convocation d’une conférence européenne pour coordonner la restructuration de la dette publique en Europe ». C’est la position du Fond Monétaire International. Il faut saigner les peuples au niveau adéquat, la situation actuelle risquant de tuer le patient.
Proposition n°87 : « Adoption immédiate d’un plan d’urgence pour éradiquer la pauvreté et l’exclusion dont sont victimes les enfants en Europe ». Nos yeux s’embuent de larmes rien qu’à l’idée que ce énième plan d’éradication de la pauvreté infantile réussira quand tous les plans précédents ont failli.
Proposition n°327 : « Plus grande autonomie de l’Espagne et de l’Europe dans l’OTAN ». Une nouvelle utilisation de l’astuce linguistique pour signifier : l’Espagne de Podemos restera dans l’OTAN.
Podemos suit exactement la même stratégie que Syriza. On va demander plein de choses gentilles à l’Europe. Puis, comme ça n’aura pas marché, on pleurera comme Varoufakis, le héros des Nuit Debout, qu’on était plein de bonnes intentions mais que l’Europe n’a pas voulu…
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Le problème majeur pour un retour à la démocratie dans nos pays, c’est que la totalité des médias est contrôlé soit directement par les plus riches, soit indirectement par le biais des gouvernements qui leur sont soumis. Que propose Podemos à ce sujet ?
Proposition n°213, « Statut de l’information
Pour répondre à la demande historique dans ce secteur, nous établirons en collaboration avec les organisations professionnelles une loi qui protègera le droit à l’information des citoyens et qui stipulera les devoirs et les droits des médias pour protéger leur indépendance des pressions extérieures, leur sécurité et liberté d’expression, des conditions de travail décentes et des droits professionnels spécifiques tel que la clause de conscience, selon le code d’éthique approuvé par la Commission européenne. »
Il y a un point positif : la mention d’un droit à l’information des citoyens (au lieu de la traditionnelle liberté de presse, liberté qui ne peut être effective que pour les plus riches).
Notons que médias et journalistes sont placés dans le même sac. Or, par médias, il faut comprendre les propriétaires des journaux, des radios, des chaines de télévision. Et les journalistes ont bien moins à craindre des pressions extérieures que de la pression intérieure qui est de satisfaire aux désidératas de leurs patrons.
Quant à leur conscience, elle ne vaut plus très cher sur le marché libre où tant de journalistes sont chômeurs.
Enfin, il est dérisoire de se référer au code d’éthique d’une Commission européenne réputée pour son opacité.
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Voyons enfin un autre point clé : le sort réservé au capital financier qui contrôle aujourd’hui l’économie.
Quatre propositions portent sur ce sujet.
La proposition n°53 portent sur l’implémentation d’une taxe sur les transactions financières.
La proposition n°55 concerne essentiellement la séparation entre banques de dépôt et banques d’investissement, sur le modèle de ce qui existe déjà au Royaume-Uni et aux États-Unis.
La proposition n°56 concerne la levée du secret bancaire dans les paradis fiscaux. C’est une proposition bien étrange car nous savons tous que les paradis fiscaux ont été éradiqués depuis longtemps, depuis aussi longtemps que la pauvreté infantile.
Enfin, la proposition n°58 concerne la création d’une banque publique d’investissement. Une telle banque a été créée le 31 décembre 2012 en France par le gouvernement Ayrault. Depuis, les petites et moyennes entreprises françaises n’ont plus aucun problème de trésorerie…
Bref, l’ensemble du programme de Podemos sur la finance peut se résumer en un mot : enfumage.
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Il est facile de prévoir le résultat des élections de demain en Espagne : la victoire des crapules est certaine.
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