Certains semblent choqués quand je parle de la stupidité de nos contemporains. Quoi ! Comment oser porter un tel jugement ? Me croirais-je plus intelligent que les autres pour affirmer qu’ils sont stupides ?
La question est mal posée. Elle s’appuie sur la conception (implicite et largement répandue) que l’intelligence serait une donnée objective, comme la taille ou le poids. Mais l’intelligence n’existe pas. Il n’y a que des preuves d’intelligence.
Une personne qui vient de mourir a toujours la même taille et pèse le même poids que quand elle était encore en vie. Mais il ne vient à l’esprit de personne de considérer qu’elle serait toujours intelligente. Pourtant, les neurones et les synapses sont encore là.
On ne sait pas mesurer l’intelligence des animaux. On invente des dispositifs variés pour les observer et savoir ce qu’ils savent faire. Ce sont leurs actions qui permettent de dire s’ils sont plus ou moins intelligents.
Il en va exactement de même pour les humains. Le QI est établi à partir de tests qui sont des preuves d’intelligence, mais qui ne mesurent bien évidemment pas l’intelligence comme la balance mesure notre poids. Et ces tests révèlent surtout ce que leurs concepteurs considèrent comme étant l’intelligence. « L’intelligence, c’est ce que mon test mesure », disait Alfred Binet.
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Je considère donc que nos contemporains ne font pas preuve d’intelligence dans la situation actuelle. J’incrimine particulièrement les intellectuels, que l’on appelle intelligentsia en russe. Voici pourquoi.
Rares sont les personnes qui ne sont pas touchées par la Crise, directement ou indirectement – pour ma part, je n’en connais pas, mais il est vrai que je ne connais pas de gens très riches. Le fait que cela dure depuis des années, que ça s’aggrave, que toutes les annonces comme quoi c’était fini ont été désavouées, génère de l’inquiétude chez les tempéraments les plus enjoués et de l’angoisse chez les autres.
Dans ces conditions, faire preuves d’intelligence serait d’accepter d’y réfléchir : présenter ses idées, écouter celles des autres ; éventuellement, preuve d’intelligence à un degré supérieur, envisager et débattre des solutions.
Je considère donc que n’importe qui, quelles que soient ses études ou sa profession, peut faire preuve d’intelligence. L’intelligence ainsi définie me semble très liée au courage et inversement proportionnelle à la vanité.
Mais, il suffit de regarder autour de nous, tel n’est pas le cas. Les preuves de stupidité, par contre, abondent. Leur point commun est : s’enfoncer la tête dans le sable.
Je ne considère pas l’intelligence comme biologique et immanente, mais comme la réponse effective qui est donnée à des problèmes auxquels personne n’échappe.
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